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Atelier : Ecrire et lire à Nizas

Atelier d'écriture et Club de lecture : publication de nos travaux , dialogue avec les lecteurs

Derrière la tenture...

C'est la dernière séance d'écriture avant l'été! Les journées sont douces, et l'air a le parfum des fleurs... Nous devisons joyeusement, et nous plions au dernier exercice avant la fête qui aura lieu en juillet, à la médiathèque, où nous présenterons quelques textes au public.   Le thème du jour : qu'est-ce qui se cache derrière la tenture??? allez! on réfléchit... et on écarte le rideau!

C'est la dernière séance d'écriture avant l'été! Les journées sont douces, et l'air a le parfum des fleurs... Nous devisons joyeusement, et nous plions au dernier exercice avant la fête qui aura lieu en juillet, à la médiathèque, où nous présenterons quelques textes au public. Le thème du jour : qu'est-ce qui se cache derrière la tenture??? allez! on réfléchit... et on écarte le rideau!

Le Secret de l’Alcôve (Marie-Claire)

La maison était sans vie, depuis la disparition des grands-parents. Quand je glissai la clé dans la serrure, un doute m’envahit. Pourquoi vouloir revivre les tristes souvenirs du passé ? L’envie était plus forte que l’appréhension que je ressentis au moment où la porte s’entrouvrait…

Je voulais découvrir le secret de l’Alcôve. J’avais toujours été impressionnée par la grande tenture aux motifs persans qui en dissimulait l’entrée. Je ne pris pas la lampe de poche pour la visiter, je voulais faire durer le mystère de la découverte, dans cette semi-obscurité.

Prendre le temps, ne pas se hâter, préserver avec longueur encore l’interdit…

D’une main, avec hésitation, je pris le rideau et, délicatement, je fis glisser les anneaux dorés sur la tringle de cuivre. Une pluie fine de poussière me poudra le visage. J’eus le réflexe instinctif de revenir en arrière, et la crainte de pénétrer dans cette pièce étroite où des guirlandes de toiles d’araignées tapissaient le dernier rayonnage.

Au sol, une grande malle en rotin trônait là, intrigante d’énigmes. Je soulevai le couvercle avec beaucoup d’appréhension. Enveloppé de papiers-journaux jaunis par les ans, que je dépliai avec délicatesse comme de vieux parchemins, je découvris l’uniforme militaire de l’arrière-grand-père, dont l’épouse racontait à sa façon, éperdue d’admiration, l’héroïsme au moment de la conquête d’Algérie : grande veste marine à galons et boutons dorés, pantalon à bandes de couleurs sur les côtés, et le casque bleu à casoar rouge.

Dessous, quelques boîtes en laque chinoise contenaient des collections de médailles militaires.

Je n’osais pas les enlever de ce tabernacle où ces reliques reposaient là depuis de nombreuses années, vénérées jusqu’à son décès par sa tendre femme.

Étonnée et attendrie, je refis glisser la tenture persane, afin de dissimuler à nouveau le secret de cet oratoire d’amour.

UN TEL FATRAS ! (Marie-Claude)

En pénétrant dans la maison, éclairée d’une agréable lumière orangée, je fus frappée par l’ordre, voire le dépouillement qui y régnait. Rien de trop, nulle décoration inutile, pas le moindre désordre ! Je décidai de faire un tour rapide de l'habitation, et déambulai dans des pièces toutes dignes de figurer dans un catalogue de décoration. Je fus convaincue que cette maison allait se vendre très rapidement. J’arrivais à la dernière pièce, une chambre située tout au bout du couloir, au rez-de-chaussée. Elle aussi fort dépouillée, elle me parut toutefois bien petite. Mais tout le fond était occupé par un rideau, qui devait ouvrir sur une sorte de dressing, à moins que ce ne fût une salle d’eau. Je tendis la main vers l’épaisse tenture vert sapin, dans le même ton que les double-rideaux et le couvre-lit, et la fis coulisser lentement sur sa tringle.

Et là, le choc !

Je me retrouvai devant le plus incroyable fatras qu’il m’ait été donné de voir. Le mot de débarras me sembla trop modeste, trop raisonnable, voire trop pudique, pour un tel déchaînement dans le désordre, pour l’entassement d’une telle somme d’objets hétéroclites amoncelés là comme par un facétieux hasard.

Il y avait un vieux frigo rouillé, dont la porte béante laissait échapper tout un stock de bouquins et revues d’une autre époque à demi mangées par les souris, quatre chaises de paille empilées deux par deux, à peine visibles sous un monceau de vêtements de toutes saisons, allant du duffle-coat au paréo, les pieds dressés coiffés de quelques petites culottes de dentelle, comme des offrandes tendues vers le plafond. J’avisai un vieil électrophone des années 60 qui trônait près d’une pile de 33 tours dont certains gisaient, cassés, échappés de leur pochette, quelques vases vaguement chinois, quelques statuettes vaguement africaines, quelques masques assurément vénitiens, mais en piteux état, et, s’échappant de ce méli-mélo, la tête d’un ours en peluche géant, aux yeux en boutons de culotte, coiffé d’une paire d’escarpins qui n’avaient pas réussi à tomber plus bas.

Il y avait aussi quelques chapeaux de paille crevés, un bouquet de fleurs si séchées qu’elles s’étaient émiettées, quelques assiettes douteuses et quelques verres opaques de poussière, une mallette déglinguée d’où s’échappait quelques papiers cornés, une boule de cristal qui n’avait pas l’air d’avoir beaucoup d’avenir, et, surmontant le tout, un miroir fendu qui me renvoyait mon image tel un kaléidoscope, m’intégrant malgré moi à ce fouillis écœurant comme pour me dire : « C’est ici qu’est ta place ! ».

LA MAGICIENNE (Monique)

Nous étions arrivés en silence, à pas feutrés. Autour de nous, on avait laissé planer le mystère, entretenu la surprise. Pourtant nombreux, nous nous étions assis en tailleur sur le parquet ciré, en demi cercle bien ordonné. Et nous avions attendu.

Dans l’angle, un rideau improvisé masquait l’évènement, tandis que les stores de la salle avaient été tirés, créant une atmosphère plus intimiste.

C’est que dans cette petite ville de province, les évènements annuels se comptaient à peine sur les doigts d’une main !

Un froissement à peine perceptible, un froissement d’ailes étouffé, le mystère derrière le rideau se manifestait. Tendus tels une corde raide, tous les regards convergèrent. Nos yeux incrédules ne clignaient plus comme pour mieux capter l’instant, à moins que ce ne fut par pur enchantement, tant le miracle prenait des allures palpables avec ses attraits et ses oripeaux, ses habits de couleur. Nous flottions entre le conte et la réalité.

Une femme, presque une fée, svelte, lumineuse, vêtue d’une longue robe parme très vaporeuse, s’était placée près d’un étrange objet. Sans nous regarder.

Existions-nous vraiment ? N’étions-nous pas en plein rêve ?

Nous respirions dans cet espace presque intangible quand des sons éthérés ajoutèrent encore à notre doute. IL nous fallut quelques instants pour caler notre présent à l’articulation délicate du moment. La demi-fée interpréta avec la grâce que confère la magie, des morceaux que je crois encore entendre, parfois, quand la félicité des lieux me transpose à nouveau dans cet état de demi-conscience. Les myriades de sons comme des étoiles s’échappèrent des cordes pincées de l’objet.

La magicienne semblait faire corps avec lui, il n’était qu’une partie d’elle-même dont elle tirait tant d’émotion. Ses gestes souples et délicats comme des caresses, ses mouvements purs et gracieux comme des berceuses retinrent tout le petit monde d’insoumis que nous étions encore à cinq ans, dans une transe hypnotique proche du divin.

Nous ne sûmes qu’après, que cet objet étrange et mystérieux, fabuleux, s’appelait une harpe et que cette belle magicienne était musicienne.

C’est ainsi que j’entrais pour la première fois dans le monde de l’art, sans le savoir.

Et voilà, c'était notre dernière composition avant l'été.  Nous nous retrouverons en septembre, avec je l'espère, de nouvelles recrues venues nous enrichir de leur imagination, de leur manière de manier la langue, et de notre commun amour pour la littérature.

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